Vieux moins-le-quart, ça n’allait plus
sa tête !
Les nuages trop chargés finissent
toujours par verser, non ?
- Mwouais…
Mordu à la bouche, à la fesse ou à
l'entrejambe par un cheval dressé à l’attaque, Vieux moins le
quart divaguait. Il perdait le contrôle de son embarcation, bousculait les
portes à bascule d’un bar de western, connaissait des ennuis mécaniques en
survolant la cordillère des Andes, se faisait adopter par des Américains
« pour combattre le capitalisme et l’impérialisme de l’intérieur »,
heurtait de plein fouet une baleine à la dérive ou une plateforme pétrolière
abandonnée et se désolait : « j’aurais mieux fait d’entrer dans la
Fonction publique et de me faire instituteur de canetons, de lapereaux ou de
poulets de grain ! »
- Mwouais… Pas vraiment de quoi
s'alarmer !
Il ne tournait plus jamais le dos à un
miroir, c’était beaucoup trop dangereux : un cheval dressé à l'attaque
pouvait toujours sortit d’un coffre, d’un puits ou d’une cheminée, lui mordre
l’oreille, arracher ses piercings…
Ces symptômes plutôt extravagants…
- Mwouais... Aucune raison de paniquer !
n’inquiétaient pas outre mesure le médecin traitant de Vieux moins-le-quart...
- Mwouais... Aucune raison de paniquer !
n’inquiétaient pas outre mesure le médecin traitant de Vieux moins-le-quart...
Ce médecin traitant…
- Pfff ! Ce n’est pas très
rassurant !
était bouddhiste, jaïniste, hindouïste, orphiste,
carpocratiste ou manichéen, en effet... et croyait fermement en la
réincarnation de ses adeptes.
Et quand il n’était pas bouddhiste, le
médecin traitant de Vieux moins-le-quart était…
- Pfff ! Ce n'est pas non plus très
rassurant !
catholique, orthodoxe, copte,
calviniste, évangéliste, mormon, membre de l'église baptiste des Premiers
Corinthiens du Ministère Amen, de la Chapelle des
Vainqueurs, de Baruti Tabernacle ou des Brebis de Jéricho... juif,
animiste, yezidi, chiite, sunnite, soufi, alaouite et croyait sûrement en
quelque chose de très suave, de plutôt écoeurant et de beaucoup trop sucré
comme… la résurrection des morts... La la lalère !, ou la possibilité, après la
mort, de trouver à se planquer quelque part, à l’aisément, dans un royaume des
ancêtres ou dans un petit coin bien tranquille, au bord de la rivière, feuillu
et bien chauffé et d’y pratiquer le pêche à la ligne… La la lalère !, et
d’y vivre de ses rentes, loyers et butins, à l’abri de la faim et du chômage,
de la pluie et du soleil, de l’hiver et l’harmattan, des rackets de la police
et des « tracasseries » de l’armée, des embouteillages et des
épidémies, des mouches et des moustiques, des prédateurs de mammifères, de la
désaffection de l’épouse et des pannes sexuelles du conjoint, du manque de
reconnaissance sociale…
Et quand le médecin traitant de Vieux
moins-le-quart était…
- Pfff ! C’est pire encore ?
Ça me fait une belle jambe !
marxiste ou positiviste, il croyait
au sens de l’histoire et au progrès scientifique universel, linéaire et
perpétuel
De quelle espèces menacées les hommes en
général et Vieux moins-le-quart en particulier sont-ils la nourriture
préférée : les vers, les crabes et les écrevisses ?
Ou bien les chacals et les corbeaux ? Les mouches ?
Ou bien les chacals et les corbeaux ? Les mouches ?
Chacun a sa mouche.
Vieux moins-le-quart a pu croire un
moment que la sienne ne s’intéressait plus à lui, qu’elle avait trouvé à
s’occuper ailleurs, qu’elle avait flashé pour quelqu’un d’autre ou …
- Pfff ! J’avais tout fait
pour ! Je m’étais montré désagréable, discourtois, ingrat, odieux ! Je lui
avais même lancé des lézards féroces et affamés dans les pattes !
qu’elle avait définitivement perdu sa
trace.
Elle vient de le retrouver ! Et…
Buzzz !, sans tarder, le relance activement !
Elle avait failli le perdre mais elle
avait réussi à retrouver sa trace, ses sueurs, son haleine et ses pets !
Buzz ! Elle l’avait choisi, quoi ! A la vie et à la mort, quoi ! Où
qu’il aille et quoi qu’il fasse, quoi ! Elle le suivait partout...Buzz !, de la cuisine aux toilettes, de la chambre au bureau, du berceau au
cercueil ! Buzz ! Avec ténacité ! Rôdant autour de ses narines et de
son trou de balle et lui chatouillant les oreilles et les naseaux, se posant
sur son verre et sur sa gamelle ! Buzz ! Elle ne voulait plus le
quitter ! Buzz !
Comment Vieux moins-le-quart pouvait-il
bien s'en débarrasser ?
Devait-il la faire la faire souffrir,
l’insulter, la malmener, la frapper, la menotter dans le dos, la traîner par
terre en la tirant par les cheveux, la plaquer sur un flipper ou sur un
juke-box ou sur le capot d’une voiture, l’écraser, l’aplatir, lui attacher les
pattes avant l'accouplement (pour limiter les risques de se faire dévorer
après), la forcer ou la sodomiser ?
Ne devait-il pas plutôt lui offrir un bouquet
de fleurs odorantes et un flacon de parfum prenant, lui faire le
baisemain, la tenir par le bras pour l’aider à descendre l’escalier, lui ouvrir
galamment la porte d’entrée … et la balancer dans la rue, la jeter sur le
trottoir, la flanquer dans le caniveau ?
Chacun a sa mouche, la mouche qu’il
mérite ! Jusqu'à la mort et pour l'éternité (dès lors qu'une mouche de
bonne famille et d'excellente compagnie n'oublie certainement pas de pondre ses
oeufs dans les chairs en voie de putréfaction de son amant) !
Chacun a sa mouche, son ange gardien et son vautour charognard personnel aussi… qui attend, patiemment, en jouant aux cartes avec des collègues…
Chacun a sa mouche, son ange gardien et son vautour charognard personnel aussi… qui attend, patiemment, en jouant aux cartes avec des collègues…
Chacun a sa sonnette, son escalier, sa
porte et ses mapapa (ou ses djimakpla) devant la porte, son corbeau, son chacal
ou sa mouche.
La sonnette retentit, l’escalier gémit,
la porte grince, les mapapa (ou les djimakpla) somnolent et attendent qu'on les
chausse... Mais une fois aux pieds, elles raclent le sol, sans aucune élégance
!, le corbeau croasse, le chacal piaule, la mouche vrombit.
Chaque être ou chaque chose a son propre
bruit ou ses silences singuliers… et chaque bruit et chaque silence est utile
et trouve sa place dans l’orchestre
Les vautours charognards, habituellement
silencieux lorsqu'ils tournoient dans le ciel, peuvent également devenir
bruyants et tapageurs quand ils se disputent une carcasse.
C’est vrai, quoi !
Ayant déjà accompli plus de 76 mandats
sur son quota, Vieux moins-le-quart…
- Pfff ! Collez-vous bien ça
dans le fusil ! Et ne me dites pas qu’il pleut quand vous me pissez
dans le dos !
divaguait et n’avait plus beaucoup
d’années, de mois ou même de jours en magasin pour terminer son règne en
beauté, diaboliquement... toujours addict à sa femme mariée, aficionado de ses lifanto,
groupie de ses koko et fervent supporter de ses compagnes et compagnons de
lutte, certes... mais déterminé à persévérer et à terminer son parcours dans
l’indignité et la transgression la plus totale… morale, musicale, sociale,
cérébrale, culturelle, spirituelle, sexuelle, constitutionnelle, militaire,
littéraire, sécuritaire, budgétaire, juridique, généalogique, économique,
patriotique… tous azimuts et tous consorts.
Pfff ! 76 mandats et bientôt 77 !
Eheeeh ! Yebela, Vié ! Fongola
miso, etikali yo kaka !
Il est donc urgent pour Vieux
moins-le-quart de trouver à s’occuper et de s’inventer de nouveaux
ennemis irréductibles à combattre jusqu’à (mais sans trop se presser quand
même) la mort, qu’il parvienne à en tuer quelques-uns, tout en gardant les
autres en réserve...
Ceux-là réussiront à s’enfuir et
jureront de revenir se venger… ce qui donnera un peu de répit à l'affreux
cabotin ?
Divaguons !
Continuons de divaguer ! Jusqu’à ce que ça pète ! Boileau a bien raison :
pour être diabolique, il faut persévérer !
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